Trottinettes, Fauteuils Roulants et Piétons : Quand un Arrêté Municipal Crée un Dilemme pour les Droits

La Ville de Montpellier (Hérault) vient de prendre une décision forte en matière de régulation de l’espace public. Son maire a publié un arrêté municipal interdisant la circulation des trottinettes à moteur dans une partie stratégique de son centre-ville (essentiellement la Place de la Comédie, l’Esplanade Charles De Gaulle et les rues adjacentes).

Si l’intention affichée – la préservation de la sécurité des piétons, notamment les personnes handicapées – est louable, cet arrêté révèle une zone d’ombre juridique majeure qui impacte directement l’autonomie et le droit à la mobilité de certains usagers de fauteuils roulants.

Le Contenu de l’Arrêté : Sécurité et Sanctions

 

L’arrêté municipal de Montpellier vise à restaurer la tranquillité et la sécurité piétonne. Désormais, les utilisateurs de trottinettes motorisées doivent mettre pied à terre dans les zones désignées sous peine de sanctions.

  • Amende : 90€

  • Saisie potentielle : de l’engin s’il est débridé (modifié pour dépasser la vitesse limite autorisée de 25 km/h) ou s’il n’est pas assuré.

Cette décision, motivée par le grand nombre d’incidents, est un exemple de la volonté des municipalités de réguler l’usage des EDPM (Engins de Déplacement Personnel Motorisés). Cependant, elle a omis de prendre en compte une catégorie d’usagers dont la trottinette n’est pas un loisir, mais un outil de compensation du handicap.


Le Dilemme des « Trottinettes Tracteuses » et du Droit à la Compensation

 

Le problème juridique réside dans l’existence de systèmes d’accrochage (souvent appelés « trottinettes tracteuses » ou handbikes) qui permettent aux personnes utilisant un fauteuil roulant manuel de se tracter plus facilement sur de longues distances. Ce matériel est essentiel pour pallier la fatigue et maintenir l’autonomie.

 

 Le Statut Juridique d’un Fauteuil Roulant Motorisé

 

La Direction de la Sécurité Routière (DSR) du Ministère de l’Intérieur a pourtant une position claire sur ce type d’engin : lorsqu’un fauteuil roulant manuel est équipé d’un système de motorisation, même de type trottinette tractrice, il conserve son statut légal de fauteuil roulant.

  • Vitesse Légale : Ce matériel est assimilé à un fauteuil roulant motorisé et doit, à ce titre, circuler à une vitesse maximale de 6 km/h, soit la vitesse du pas humain.

  • Lieu de Circulation : Ces engins ont le droit de circuler sur les trottoirs, étant considérés comme des piétons motorisés ou des aides techniques, à condition de ne pas dépasser cette limite de 6 km/h.

L’arrêté municipal de Montpellier, en interdisant toute circulation de « trottinettes à moteur » sans distinction, crée une confusion dangereuse. Il met en opposition deux droits fondamentaux : le droit à la sécurité des piétons et le droit à la compensation du handicap par une aide technique appropriée.

 

Conséquences Pratiques

 

Un policier municipal se retrouvant face à un usager de fauteuil roulant tracté par une trottinette – matériel dont la vitesse est potentiellement supérieure à 6 km/h mais qui est bien un outil de compensation – se trouvera face à un véritable vide juridique local.

L’objectif de l’arrêté (protéger le piéton handicapé) est perverti par son application, car il menace d’entraver la mobilité de ce même public. L’esprit de la Loi du 11 février 2005 – qui place la compensation du handicap au cœur des priorités – est ici bafoué par une réglementation locale trop englobante.

Explication d’ENTRE4ROUES : Un arrêté municipal, aussi légitime soit-il, ne peut pas contredire le Code de la Route ou les principes fondamentaux du droit au handicap. Le matériel utilisé comme aide technique (le fauteuil roulant tracté) doit prévaloir sur la simple désignation de « trottinette à moteur ». L’usager devrait pouvoir invoquer son statut de piéton équipé d’une aide technique à la mobilité.

" Chez ENTRE4ROUES, nous considérons que l'accès au droit une nécessité citoyenne qui garantit le lien social, la dignité et l'autonomie et le respect."

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Un Contexte Économique Fragile pour les Solutions Adaptées

 

Cette situation réglementaire incertaine s’inscrit dans un contexte économique délicat pour les entreprises spécialisées. La société qui commercialise ce type de trottinettes tracteuses a récemment été placée sous procédure de sauvegarde par le Tribunal de commerce en avril dernier.

Cette procédure, destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise pour lui permettre de maintenir son activité, illustre les difficultés structurelles que rencontrent les acteurs qui innovent dans le domaine de la compensation du handicap. La complexité du marché, le faible remboursement et le manque de clarté réglementaire contribuent à fragiliser ces entreprises pourtant essentielles.

L’association ENTRE4ROUES appelle les municipalités à faire preuve de discernement et à consulter les associations d’usagers avant de publier des arrêtés généraux. Il est crucial d’introduire des exemptions claires pour les aides techniques à la mobilité afin de garantir que la recherche de la sécurité ne se fasse pas au détriment de l’autonomie des personnes en situation de handicap.


Faire Respecter le Droit à la Mobilité : Rejoignez ENTRE4ROUES !

 

Le cas de Montpellier montre la nécessité de se battre pour le respect des droits et l’application intelligente de la loi. ENTRE4ROUES est mobilisée pour garantir que les aides techniques soient reconnues et protégées face à la réglementation urbaine.

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